Culture numérique

Cette question, celle de la culture numérique, est centrale à l’ensemble de la démarche de Fabrice Marcoux (ma démarche) justifiant la mise en ligne du site Y penser. Qu’est-ce que la culture numérique ? La «culture numérique» est-elle une culture séparée de la culture dans son ensemble ou bien s’agit-il d’une expression équivalente, l’addition de l’adjectif «numérique» n’ajoutant virtuellement rien à la signification du mot «culture» ?

Le site Cultunum.com est un site cousin d’Y penser. Il est dédié plus spécifiquement à toutes les questions évoquées dans cette introduction.

À tout le moins, il sera facile de convaincre la plupart des lecteurs, que la culture numérique fait partie de la culture en général, le web étant un important véhicule de manifestations culturelles. Elle est même devenu un moyen incontournable de diffusion des arts et des évènements visant à nous rassembler autour de rythmes, de performances et de propositions (incluant des interrogations) de toutes sortes ainsi qu’un outil indispensable de transmission des connaissances, en particulier pendant la pandémie (COVID-19), où les contraintes entourant les rencontres en personne étaient nombreuses. Et une multitude de formes d’expression émergent grâce aux outils de communication que sont l’internet, le web, et les différentes applications que l’on peut installer sur nos téléphones, en voie de devenir de véritables centres de commandes de nos existences. Mais le fait que l’ensemble de ces techniques, incluant les jeux faisant appel à des environnements dits «virtuels», soient dépendantes de l’informatique et de la connexion d’ordinateurs en réseaux, «communiquant» grâce à des protocoles et permettant des usages aussi bien pervers que salutaires, et que cette quincaillerie consiste en outils dénués d’âme et d’intentions, signifie-t-il que le «numérique» soit réductible à un ensemble de moyens et ne puisse accéder au titre prestigieux de «culture» ?

Une ligne d’argumentation que l’on entend souvent est que le numérique ne consiste qu’en un ensemble d’outils, et que sa valeur ou sa signification dépend de l’utilisation que nous faisons de ces «instruments». Ce que cet argument sous-entend (et l’idée est souvent formulée explicitement), est que le numérique est «neutre» en soi. Si on admet ce présupposé, la thèse voulant que le numérique ne soit que la facette technique la plus élaborée d’une culture dont le coeur se situe ailleurs se trouverait grandement renforcée. Or, cette idée que la dimension technique de nos usages serait neutre a souvent été contestée. On peut penser aux travaux de Gilbert Simondon, à ceux de Bernard Stiegler (Le temps et la technique), et avant aux réflexions de Marshall McLuhan, notamment dans Pour comprendre les médias. En fin de compte, l’erreur est d’essentialiser le numérique tout comme d’essentialiser la culture. La culture n’est possible qu’à la faveur d’un ensemble de conditions qui permettent son émergence. La technique a toujours fait partie des conditions qui ont rendu possible l’interprétation par les êtres humaines du sens de leur appartenance au monde, c’est à dire l’exercice de leur conscience critique, notamment en s’interrogeant sur leur situation d’un point de vue existentiel, et pas uniquement pratique. Que ce soit par l’écriture, ou d’autres techniques de soi, comme dirait Foucault, les êtres humains ont toujours mobilisé des dispositifs qu’ils avaient façonnés (et qui n’étaient pas issus directement de la nature) pour construire leur identité et remettre en questions leurs préconceptions, héritées d’une constitution qui a elle-même commencé à devenir véritablement anthropologique, à partir du moment où elle a pu être modifié par l’ensemble de pratiques et de croyances qui sont considérées comme le tissu même de nos cultures. Et ces cultures sont des organismes vivants qui nous englobent – comme le corps est un tout qui dépasse l’ensemble des cellules qui le composent, si on peut se permettre de pousser la métaphore – et qui se maintiennent tout en évoluant, grâce principalement à l’éducation, ce grand «métabolisme régulateur des moeurs et des mentalités». L’éducation intègre le déploiement de nombreuses «techniques» à son processus et ne sautait être accusée de constituer un corps étranger à la culture pour autant. Son efficacité non plus ne peut être invoquée pour la disqualifier comme partie intégrante de ce grand contexte valant comme un écosystème, que nous nommons «culture» et qui renvoie aussi bien à notre environnement (notre milieu de vie) qu’à notre intériorité (notre psychologie). La culture n’est possible comme toute réalité puissante et vivante, que par l’association étroite et la collaboration constante des éléments qui relèvent de l'»individualité» et ceux qui renvoie à l’assemblage des participants à cet immense laboratoire… qui est forcément «collectif».

Vous aurez compris que je me range du côté de la thèse de mon directeur de recherche, Marcello Vitali-Rosati, qui réfute la relégation du numérique à une simple «quincaillerie» qui ne serait qu’un agrégat de moyens que l’on pourrait détacher de la culture sans dénaturer celle-ci. Les partisans de cette approche qui essentialise la culture plaident que le numérique est un aspect irréel de notre monde en se référant à la relation que l’on établit entre la notion de virtuel et les techniques qui relèvent d’informatique connectée. Non seulement les moyens que nous utilisons ne son pas irréels, et notre interprétation du virtuel comme contraire du réel doit être révisée, comme il l’a bien montré dans S’orienter dans le virtuel, mais encore, le sens même de nos activités dépend en grande partie du type d’outils que nous mobilisons et de la manière dont nous nous en servons. Je suis donc d’accord en partie avec les personnes (innombrables) qui disent que les nouvelles technologies sont des outils et que leur valeur dépend de l’usage que nous en faisons. Mais force est d’admettre que nous ne pourrions avoir les mêmes usages avec des outils différents. Par conséquent notre culture est modifiée par la technologie que nous employons.

On peut apprécier cet impact des techniques sur notre humanité de deux façons aux moins. La signification de l’activité se trouve modifiée en raison du processus par lequel elle devient possible, ce qui est attribuable en bonne partie à la forme et au fonctionnement des moyens que nous mettons en oeuvre pour y arriver. Et les techniques mécaniques et électroniques font partie de ces moyens, même si ceux-ci ne se limitent pas à celles-là : nous employons aussi des techniques religieuses (rituels) et spirituelles (auto-conditionnement pyschologique). C’est la première manière d’envisager cette influence des «instruments» sur la «musique» que nous pouvons jouer et que nous considérons comme le fleuron de notre culture. Une deuxième manière de considérer cette portée de l’outillage sur l’art ou l’œuvre qui en découle, c’est la réaction en chaîne des effets qui sont produits de manière concomitante en raison du fait que nous avons eu recours à ces moyens et non à d’autres. Que l’on pense aux ressources naturelles utilisées, à l’énergie de travail dépensée et aux préparatifs que cela a requis en investissement dans des processus d’extraction et de formation. Produire des œuvres culturelles requiert un terreau et une société qui permettent à ces réalisations de voir le jour. Or ce sol et ce système ne reposent pas dans le néant. Et le créations ont une empreinte environnementale, de même qu’elles laissent des traces en termes de données d’usage, qui peuvent à leur tour être exploitées. Et cela est d’autant plus vrai lorsqu’on parle de culture numérique. Par conséquent, on peut dire que la culture numérique est différente de la culture «analogique» en partie en raison du fait qu’on a franchi un seuil dans la capacité à récupérer les informations entourant les évènements pour en faire une utilisation stratégique afin de mieux positionner d’autres produits culturels. Et elle présente aussi un aspect inédit, soit une opportunité de faire une différence à de nombreux niveaux en termes de ce qui pourra être vu, entendu et vécu, et de l’efficacité énergétique de ces productions. Enfin, elle offre une chance de rendre les œuvres et l’expérience des différentes facettes de la culturelle accessible pour de nouvelles clientèles pour qui le fait d’assister à une pièce de théâtre ou d’écouter une pièce de musique était un privilège trop rare.

Mais il se pourrait aussi que nous manquions cette opportunité de le faire d’une manière plus écologique. Car l’empreinte environnementale des NTICs est loin d’être nulle. Ne serait-ce que pour cette raison, les technologies numériques ne sont pas «neutres». Puis elles amènent une transformation de l’économie, et modifie notre psychologie.

L’éducation doit donc plus que jamais jouer son rôle de régulation. Nous approprier le numérique n’est pas une option. C’est un obligation.

Mais, ici encore, la manière dont nous le ferons jouera un rôle capital.

Afin de nous aider à mieux envisager cette démarche en tenant compte de la vision à long terme qu’il importe de développer collectivement, cette section vise à engager la réflexion autour de questions qui sont pertinentes au regard de cet enjeu.

Comment s’approprier la culture numérique ?

Pourquoi le numérique est d’abord et avant tout une culture ?

C’est une question essentielle. Cela ne veut pas dire que nous nions les dimensions matérielles du numérique. Mais il existe d’abord et avant tout à travers nos pratiques. Et c’est pratiques constituent également notre culture. C’est pourquoi numérique et culture tendent à s’identifier (devenir identiques).

À quoi nous appelle le mouvement de transformation numérique ?

Attention, par là je ne veux pas faire référence aux courants accélérationnistes ou transhumanistes. Je vise simplement le travail d’appropriation des possibilités liées à la culture numérique par les milieux culturels eux-mêmes, comme nous y entraîne notre mandat en tant qu’agents de développement culturel numérique (ADN). Voir le wiki du RADN (Réseau des ADN).

Comment effectuer un diagnostic numérique pour se situer et identifier ses besoins ?

Quels types de diagnostics numériques peuvent être faits ?

Qu’est-ce qu’on est censé savoir au terme d’un diagnostic numérique de chacun de ces types ?

Pourquoi la littératie numérique est-elle au coeur des objectifs que vous devez poursuivre si vous voulez réussir votre transformation numérique ?

La littératie numérique désigne l’état d’une personne ou d’une organisation qui a atteint un degré satisfaisant de maturité numérique au regard de ses objectifs en lien avec un contexte techno-culturel donné

La littératie médiatique est la base de la littératie numérique

L’éducation aux médias est donc fondamentale dans le processus d’acquisition d’une littératie numérique suffisante

Pour acquérir toutes les compétences numériques nécessaires, il faut d’abord les connaître

Quelles sont les principaux référentiels de compétences numériques ?

Quelles sont les avenues possibles pour orienter son organisation (ou sa propre personne) et ses membres vers l’appropriation de ces compétences ?

Pourquoi les boites à outils ne suffisent pas et qu’il est important de développer des capacités d’édition numérique afin de les mettre à jour au fur et à mesure.

Pour aller plus loin

Voir mon mémoire sur la culture numérique : De la constellation Marconi au métissage hypermédiatique, comment évaluer l’évolution découlant de la «conversion numérique» ?

Le site Cultunum.com est un site cousin d’Y penser. Il est dédié plus spécifiquement à toutes les questions évoquées dans cette introduction. Pour l’instant il est toujours en cours d’élaboration. Mais il contient déjà un wiki (basé sur Tikiwiki) nommé CultNum (Culture numérique) qui vous permet d’apporter des contributions à la culture numérique. Rendez-vous sur cultnum.com, le site qui rassemble les personnes curieuses d’en apprendre davantage sur la culture numérique.