Pourquoi nous efforçons-nous de communiquer?
On dit souvent qu’Aristote définissait l’être humain comme un animal social.
Dans la mesure où on admet cette définition de l’humanité, il est possible d’en déduire qu’il est naturel pour l’homme de communiquer.
Pourtant, tous les êtres humains n’ont pas la même facilité à le faire.
Qu’est-ce que communiquer au fond? Ce n’est pas un acte si facile à accomplir si on entend par là, prendre quelque chose qui est dans son âme et le faire advenir au monde.
Comment ce qu’on livre ainsi de soi, qui ne peut être que quelque chose de profondément intime, puisque ça vient de son intériorité, sera-t-il reçu?
Communiquer c’est prendre le risque de se rendre compte que les personnes autour de soi ne nous comprennent pas.
Même moi, qui ai de la facilité à exprimer des idées, et qui ne suis pas timide, je me rends compte que j’ai bien souvent été compris tout de travers.
Ce n’est pas que les personnes auxquelles je m’adressais étaient stupides.
C’est que la communication est d’abord et avant tout une question de contexte.
Dans quel état d’esprit est la personne qui écoute mes paroles?
Son attention lui permettra-t-elle de resituer tous les propos prononcés dans une perspective qui permet de reconstituer le sens correctement.
Écouter est un travail immense.
C’est pourquoi il ne suffit pas de parler pour se faire comprendre.
En fait, la communication est une pratique artistique et esthétique de collaboration.
C’est ainsi qu’on peut se comprendre à demi-mots, lorsqu’on y met vraiment du sien.
Mais ce n’est pas parce que la communication est fluide entre deux personnes qu’il est facile de comprendre de quoi il en retourne. Est-ce de l’amitié, de l’amour fraternel, de la complicité découlante d’affinités interpersonnelle? Ou une complémentarité accidentelle?
Quel est le rôle des coïncidences heureuses dans une communication réussie.
L’art sublime de dire la difficulté de la vie ne tient-il pas d’abord à la capacité de faire se révéler des coïncidences qui demeurent inexprimables?
Bon je vous ai perdus.
Qu’est-ce que je vous disais? Malgré mon aisance à jouer avec les idées et à manier les mots pour les énoncer, je demeure fondamentalement incompris.
Communiquer c’est risquer la solitude.
Mais cela ne veut pas dire qu’il ne vaut pas la peine de s’y efforcer.
La solitude n’est pas une fin en soi.
C’est le début de la conscience réfléchie.
Platon disait : tout ce qui est beau est difficile.
Habermas a fait de l’agir communicationnel l’objet de sa philosophie.
Mais on peut aussi se concentrer sur la logique des mondes, d’Alain Badiou. Et on ne sera pas déçu de la philosophie. Même si on sera sans doute très perdu.
D’autant plus qu’on n’aura pas trouvé toutes les réponses à nos questions esthétiques.
Mais cet étonnement dans lequel nous serons laissés, ne nous aura pas jetés si loin des pieds de la beauté.
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