Philosophie

L’importance de la philosophie

Au cours de leur vie, la plupart des hommes se trouvent – à un moment ou à un autre – confrontés à des épreuves qui les poussent dans leurs derniers retranchements. Dans certains cas, l’enfermement en soi-même dure plus longtemps qu’il n’aurait été nécessaire pour traverser la crise. Mais dans un nombre heureusement plus important de cas, l’individu isolé et qui se sent attaqué par les circonstances, même s’il a pu être tenté de céder à la panique, par la grâce de je ne sais quel ressort intérieur à notre constitution, trouve le souffle nécessaire pour persévérer dans la recherche de solutions, et s’il emploie la force n’abuse pas de la violence qui pourrait conduire à quelque conséquence irrémédiable, s’activant en mobilisant toutes ses capacités, son désir de survivre, sa volonté d’être libre, son imagination qui lui permet d’envisager une suite des choses qui lui sourit, et son intelligence qui l’aide à évaluer les meilleures moyens de se relever de ce mauvais pas. Les émotions dont nous sommes pétris nous rendent susceptibles de faire des erreurs de jugement, mais ce sont elles aussi qui nous permettent de trouver le courage de nous redresser face à l’adversité. Car nous pensons, dans ces moments de détresse, aux êtres que nous aimons et qui comptent sur nous pour leur apporter soutien moral et compagnie fraternelle, dans la quête inachevée du sens qui est notre lot.

L’importance de la philosophie se révèle donc à nous dans les contextes critiques où nous sommes contraints par le danger de mort matérielle ou morale qui semble imminent, de faire appel aux ressources de notre sensibilité, de notre conscience et de notre culture (cet héritage qui transparaît à travers nos gestes et nos paroles) – ce qui nous fournit les ingrédients pour composer notre manière de raison – afin de déjouer le mauvais sort et de reprendre une confiance en notre pouvoir de nous en sortir. Car c’est par cette rebellion de l’ego contre le destin qui voudrait le terrasser que la richesse de la raison révèle son utilité. C’est toujours, je ne sais pour quelle raison justement, en dernier recours, qu’on fait appel à elle, mais elle demeure le meilleur rempart contre le trépas, comme l’expérience la plus universelle n’a cessé de le révéler jusqu’à ce jour. Certains l’ont appelée ruse, d’autres intellect, d’autres stratégie et certains puristes logique. C’est la soeur de la philosophie avec laquelle elle marche main dans la main (non sans tension). Comme l’existence est indissociable du fait de pouvoir percevoir cet être que nous formons, faute de quoi il ne serait question de chercher à y trouver une valeur. Mais quel est cet être que nous formons ? Qui est ce nous dont je parle ? Et pourquoi est-ce que je m’en préoccupe ? Ce sont des questions qui peuvent paraître futiles, y compris lorsqu’il y a péril en la demeure. Et pourtant, ceux qui ont véritablement frôlé la mort le reconnaîtront, s’ils y réfléchissent avec attention: ces questions sont aussi essentielles que celle de savoir pourquoi la vie vaut-elle la peine d’être vécue. Il y a une part de mystère qui se manifeste lorsqu’on s’aventure sur ce territoire aux fondements et aux contours incertains de la pensée. Il faut avoir le goût du risque pour s’y engager avant même que les signes d’un quelconque danger ne se révèlent à notre appréciation. Mais cela fait partir des attraits de cet horizon.

Repères philosophiques

Par contre la perspective de s’avancer sur une terre aux reliefs inconnus et dont on ne connaît pas les lois qui gouvernent les habitants qui la peuple, cela peut susciter une certaine angoisse. Et cela est juste de chercher à découvrir quelques points de repères sur lesquels on pourra s’appuyer pour orienter notre exploration. Reste que ces ancrages qui permettent de sentir que nous ne sommes pas complètement perdus lorsque nous nous enfonçons dans ce continent où la côte recule au fur et à mesure qu’on s’approche comme un mirage de rive, ou une lune qui nous tient en respect de la toucher, ce sont aussi des poids qu’il faut porter et ils peuvent nous induire en erreur. Dès lors il conviendra de mobiliser ces références avec prudence. Il est naturel que selon notre éducation nous nous référions plus volontiers à des penseurs que nous connaissons, pour les avoir entendus citer. Notre monde n’est pourtant pas le monde de nos ancêtres, et il y a aujourd’hui des philosophes qui ont pu s’abreuver à différentes traditions de sagesse. De sorte qu’il est judicieux, jusqu’à un certain point, de faire confiance à nos contemporains pour constituer de meilleurs guides que les anciens en ces terrains parsemés de sables mouvants. Je sens cependant que cette opinion n’est pas si sûre. Car le temps a filtré les idées qui nous sont parvenues du passé, et les philosophes de l’antiquité ont nourri les théories des penseurs modernes (ceux des Lumières, de la dialectique et de la phénoménologie). Et celles-ci servent d’appui à bien des institutions dont nous dépendons encore aujourd’hui dans les sociétés démocratiques. Alors il ne faudrait pas adopter une attitude trop hautaine, et nous improviser clairvoyants, sans avoir puisé aux sources qui ont duré. Le défi consiste ensuite à se faire une tête pour prendre des décisions qui soient véritablement intelligentes. Ce qui veut dire d’abord qu’elles soient cohérentes, et qu’elles respectent les valeurs que nous nous sommes données et qui méritent ce crédit que nous leur accordons.

Qu’est-ce que la philosophie ?

C’est l’immémoriale question. Kant se demandait qu’appelle-t-on penser ? Deleuze a écrit précisément sur ce sujet. On peut prendre comme point de départ l’étymologie et dire que le terme veut dire Amour de la sagesse. Mais c’est qu’on on en apprend davantage sur la vie (et la mort) de Socrate que l’on commence à comprendre ce que cela signifie. On se rappelle la prescription que le temple de Delphes présentait en son fronton : connais-toi toi-même (Gnoti seauton). C’est l’Oracle qui dit à Socrate qu’il est le plus sage d’entre les hommes, et c’est pour démentir cette assertion qui lui paraît énorme qu’il va à la rencontre des hommes qui ont la réputation d’être sages. De là vient le fait qu’il se rend compte qu’effecivement la plupart d’entre eux se leurrent eux-mêmes en se considérant comme sages. En ne présumant pas qu’il l’était, Socrate avait au moins l’avantage sur eux de ne pas le prétendre. Mais comment fit-il pour découvrir qu’ils étaient dans l’erreur ? Il souhaitait véritablement comprendre ce qu’était la sagesse (sophia en grec). C’est aussi parce que le point de départ de la véritable sagesse c’est de reconnaître qu’on ignore ce qu’elle est qu’il est permis de parler de la recherche de la vérité philosophique comme d’une entreprise véritablement déroutante. Mais alors commence à poindre le sentiment de la conscience. Qui est une expérience unique dont nous avons la chance de posséder la jouissance, étant donné que nous sommes capables de mener cette activité réflexive qui consiste en une quête dont l’issue n’est pas déterminer à l’avance, mais à laquelle se mêle, en toile de fond (ou comme fil conducteur), la question du sens. D’où le lien avec celle des valeurs.

Mais de toutes les valeurs, quelle est la plus grande, qui est susceptible d’éclairer le chemin des personnes qui osent se livrer à l’activité de la conscience, la pensée ou la réflexion ?

Mes sujets de prédilection

C’est peut-être lié à mon côté rebelle, mais j’ai un faible pour la mal aimée des valeurs cardinales, la beauté. Je l’aime non pas pour elle-même, mais parce qu’elle m’amène à me questionner sur ce à quoi son nom renvoit. L’esthétique est la discipline philosophique qui prend la question du sens de la beauté pour objet.

Ceci dit, je considère que rien n’est sans appréciation. Par conséquent j’ose dire que l’ontologie devrait pouvoir être considérée comme la fille de l’esthétique. Mais c’est une relation d’ascendance/descendance complexe : au début était la question : «quelle est la condition de possibilité de toute co-présence ?». À ce sujet je vous invite à lire l’essai de mon ami François Genest, sur La Cité d’Athena

Des espaces en lignes pour se ressourcer en connaissances philosophiques

Les classiques des sciences sociales

Les Éditions Liber

La revue Argument

L’espace En commun par Projet collectif.